Description of Historic Place
L'édifice Joseph-Arthur-Godin, classé monument historique, est un ancien immeuble de rapport construit en 1914. L'édifice en béton s'inscrit dans le mouvement de l'architecture moderne. Il présente un plan rectangulaire à quatre étages, des façades ondulantes, des balustrades et des ouvertures de formes courbes ainsi qu'un toit plat. Il occupe le sommet d'une pente, dont il épouse la dénivellation. L'édifice est situé à l'intersection de deux artères importantes, soit la rue Sherbrooke et le boulevard Saint-Laurent, dans l'arrondissement municipal de Ville-Marie de la ville de Montréal.
Heritage Value
La valeur patrimoniale de l'édifice Joseph-Arthur-Godin réside dans son intérêt architectural. Il s'agit de l'un des rares immeubles de rapport construit à Montréal avant la Première Guerre mondiale. Avec sa hauteur limitée (variant de 4 à 6 étages) ainsi que la présence d'un escalier intérieur en colimaçon et d'espaces commerciaux au rez-de-chaussée, il se rapproche des modèles parisiens d'édifices de logements. L'influence européenne s'y fait également sentir à travers les emprunts stylistiques à l'Art nouveau, tels les lignes souples des façades ondulantes et des ouvertures de formes variées, les balcons en demi-lune et les voussures en éventail des portails. Par ailleurs, sa conception architecturale s'éloigne des pratiques courantes à l'époque au Québec par le retrait de la section centrale de l'une des façades principales aux niveaux supérieurs et par la mise en valeur de la forte dénivellation du terrain au moyen d'une division horizontale bien marquée. L'utilisation du béton laissé à nu, la lisibilité des éléments structuraux qui trouve une application dans les trois arcs monumentaux en façade et l'absence d'ornementation superflue sont autant de manifestations de sa modernité. L'édifice Joseph-Arthur-Godin est donc un bâtiment innovateur, tant du point de vue de la composition que du traitement architectural.
La valeur patrimoniale de l'édifice Joseph-Arthur-Godin réside aussi dans son intérêt technologique et didactique. Cet édifice constitue l'un des rares exemples d'architecture résidentielle en béton du début du XXe siècle en Amérique du Nord. En effet, si des structures de béton sont élaborées et employées en architecture dès la fin du XIXe siècle en Europe, leurs premières applications au Québec ne se situent que vers 1910. Ces structures sont alors utilisées dans les travaux d'ingénierie (pont, aqueduc, tunnel, etc.) et dans l'architecture industrielle. L'édifice Joseph-Arthur-Godin, construit en 1914, est donc l'un des premiers immeubles de rapport québécois en béton. Le squelette de béton armé est constitué de piliers et de poutres qui supportent des dalles également en béton. Cette technique s'apparente au système inventé et breveté par François Hennebique (1842-1921), ingénieur français, au début des années 1890. L'édifice témoigne ainsi de l'avènement de nouvelles techniques et de nouveaux matériaux ainsi que d'une volonté de renouvellement formel.
La valeur patrimoniale de l'édifice réside également dans son association avec son architecte-promoteur, Joseph-Arthur Godin (1879-1949). Ce pionnier de l'architecture en béton armé à Montréal a réalisé peu d'oeuvres, mais certaines sont marquantes, notamment le théâtre des Variétés, érigé pour la compagnie Confederation Amusement Limited en 1913, et l'édifice qui porte aujourd'hui son nom.
La valeur patrimoniale de l'édifice Joseph-Arthur-Godin réside en outre dans son intérêt ethnohistorique. L'immeuble est situé à l'intersection du boulevard Saint-Laurent et de la rue Sherbrooke, un carrefour important pour la population montréalaise. D'une part, le boulevard Saint-Laurent trace la limite entre l'est et l'ouest de Montréal et constitue une sorte de frontière entre les deux grandes communautés linguistiques. De plus, l'édifice est situé au coeur d'un quartier multiethnique, dont l'axe principal est la rue Saint-Laurent (la « Main ») et où se voisinent ateliers de confection et boutiques. D'autre part, la rue Sherbrooke délimite ce qui était traditionnellement considéré comme le bas et le haut de la ville. Au tournant du XXe siècle, cet axe s'entoure de résidences bourgeoises et de prestigieuses institutions dont plusieurs subsistent. Avec ses caractéristiques formelles particulières et uniques, l'édifice Joseph-Arthur-Godin constitue ainsi un repère visuel au croisement de deux mondes.
Source : Ministère de la Culture et des Communications du Québec, 2005.
Character-Defining Elements
Les éléments clés de l'édifice Joseph-Arthur-Godin liés à sa valeur architecturale comprennent, notamment :
- le volume, dont le plan rectangulaire, les quatre étages et le toit plat;
- les caractéristiques rattachées à l'architecture moderne, dont l'utilisation du béton laissé à nu, la lisibilité des éléments structuraux marquée entre autres par les trois arcs monumentaux en façade et l'absence d'ornementation superflue;
- les caractéristiques rattachées à l'Art nouveau, dont les lignes souples des façades ondulantes et des ouvertures de formes variées, les balcons en demi-lune, les voussures en éventail des portails et l'escalier intérieur en colimaçon;
- le retrait de la section centrale de l'une des façades principales aux niveaux supérieurs;
- la division horizontale mettant en valeur la forte dénivellation du terrain;
- les fenêtres en bois à battants avec partie centrale fixe et imposte cintrée au rez-de-chaussée et les fenêtres en bois à guillotine aux étages.
Les éléments caractéristiques de l'édifice Joseph-Arthur-Godin liés à son intérêt technologique comprennent, notamment :
- la structure de béton armé (poutres, piliers et dalles) et l'utilisation du béton comme matériau de remplissage.
Les éléments caractéristiques de l'édifice Joseph-Arthur-Godin liés à son intérêt ethnohistorique comprennent, notamment :
- la situation au carrefour des rues Saint-Laurent et Sherbrooke, à la jonction de l'est et de l'ouest ainsi que du nord et du sud de la ville.